Édifice de la statue du Général

La fondation Charles de Gaulle et la mairie d’Évreux s’engagent dans un projet d’édifice d’une statue à l’effigie du Général De Gaulle à Évreux.
En signant une convention de partenariat le 10 octobre 2017, la Fondation Charles de Gaulle et la ville d’Evreux ont décidé de s’associer dans la conception et la réalisation d’une œuvre qui constituera non seulement un repère historique fort, mais aussi un symbole de l’esprit de résistance d’Evreux.

L’installation est prévue sur la place de l’hôtel de ville d’Evreux, qui porte elle-même le nom du général de Gaulle depuis 1944, année de sa visite officielle dans la cité ébroïcienne.

Parallèlement au lancement de la collecte de fonds, un appel à candidatures sera lancé pour la conception et la réalisation de la statue par un artiste.

Annonce du partenariat entre la Mairie d’Evreux et la Fondation Charles de Gaulle



Visites du Général De Gaulle à Evreux

Le 8 octobre 1944

Le 23 août 1944, Évreux est libérée par les troupes américaines. Le lendemain, le Général de Gaulle devient chef du Gouvernement Provisoire de la République française, transféré d’Alger à Paris le 25, transformé, le 9 septembre, en Gouvernement d’Unité Nationale. Charles de Gaulle décide d’entreprendre une grande tournée des villes françaises, afin de « reprendre en main » les provinces, car, comme il l’écrira dix ans plus tard dans ses « Mémoires de Guerre » : « Les nouvelles parvenues d’un grand nombre de départements y révélaient une vaste confusion. Sans doute les commissaires de la République et les préfets nommés d’avance occupaient t’ils partout leur poste. Mais ils avaient le plus grand mal à mettre gens et choses en place. Trop d’indignations, accumulées depuis quatre ans, fermentaient sous le couvercle pour qu’il n’y eût pas d’explosion. »

Début octobre 1944, le Général de Gaulle rend visite aux cités normandes, dramatiquement touchées par les bombardements alliés. Le 8 octobre, il est attendu à Evreux. Deux jours auparavant, le Conseil municipal décide par délibération de changer le nom de la place de l’Hôtel de Ville, rebaptisée Place du Général de Gaulle. Sont conviés à rendre hommage au chef de la France Libre les hauts fonctionnaires, les conseillers municipaux emmenés par le maire Georges Bernard et les représentants des divers organismes résistants.

Le 7 octobre, le Général a passé la nuit au Havre. Le lendemain, conformément à la tradition, il est accueilli aux limites du département, à Pont-de-l’Arche, par le préfet Georges Cornu et Georges Bernard, maire d’Evreux et Président du Comité Départemental de Libération. Celui-ci prononce alors une adresse au Général.

Place du Général de Gaulle, 8 octobre 1944

En début d’après-midi, une foule immense se masse devant l’hôtel de ville afin de saluer le héros national. A 13h30, accompagné, outre des personnalités précédemment citées, du lieutenant Guy (son aide de camp) du général Le Gentilhomme, de MM. Gaston Palewski et Brouillet et du commandant Charbonneau des cabinets civils et militaires, de François Tanguy-Prigent et Pierre Mendès-France, respectivement ministre de l’agriculture et ministre de l’Économie nationale et figure politique majeure du département de l’Eure, Charles de Gaulle arrive à Evreux. Le cortège suit la rue de l’Horloge jusqu’à la place de Gaulle, où le bataillon des F.F.I. du commandant Stouls présente les armes. Sont également présents les anciens combattants, les troupes de prisonniers et tous les groupes ayant participé à la libération de la ville.

Depuis le balcon de l’hôtel de ville, le maire prend d’abord la parole : «Mes chers compatriotes. La ville d’Evreux, malgré ses blessures, malgré ses angoisses, malgré ses deuils, vit aujourd’hui l’une des plus mémorables journées de ses longues annales. L’honneur qui lui est fait se mesure à la valeur de l’hôte qu’elle reçoit, et le général de Gaulle, entré vivant dans l’histoire parmi les meilleurs serviteurs de la Patrie, nous apparaît déjà comme au moins égal aux plus grands d’entre eux ». Suit une adresse au Général de Gaulle par le Président du Comité Départemental de Libération. Enfin, Charles de Gaulle s’adresse aux ébroïciens.

Voici l’intégralité du discours qu’il prononce : « Comme je suis ému et impressionné de l’accueil magnifique que me fait Évreux et les paroles très émotionnantes que vient de prononcer Monsieur le Maire. Oui, ici, comme partout, du premier coup, nous nous sentons ensemble. Frères et sœurs, fils et filles d’une même patrie et tous en même temps nous apercevons au milieu de nos ruines quelle est l’immensité de l’effort fraternel que nous avons à accomplir. Nous avons à gagner la guerre, ce qui n’est pas fait encore. Nous avons à gagner la guerre au moyen de nos armées, côte à côte avec nos alliés, mais d’abord avec la grande armée française qui est celle de l’empire, et celle que nous faisons ici. Car l’une et l’autre n’en font qu’une. Je dis bien : qu’une armée française ».

Après un tonnerre d’applaudissements, Charles de Gaulle reprend : « Et puis nous avons à réparer tout ce qui a été détruit chez nous depuis quatre ans et davantage, tout ce qui a été détruit matériellement, peut-être aussi ce qui fut altéré moralement. Dans cette affaire il nous faut reconstruire et moralement parlant il nous faut rassembler. Il faut nous regrouper les uns sur les autres. Peut-être quelques-uns se sont-ils trompés, peut-être quelques autres ont-ils pris un fâcheux chemin. Nous croyons que c’était de bonne foi, du moment que c’était sans profit. Ceux-là comme les autres doivent rallier l’unanimité de la Nation. La France a besoin pour se rebâtir du concours de tous ses enfants, de tous ses fils et de toutes ses filles, pourvu qu’ils soient de bonne volonté. »

Deuxième salve d’applaudissements. « Enfin une autre grande tâche s’étend devant nous, non seulement la guerre, non seulement la reconstruction, mais comme l’a dit Monsieur le maire, la Rénovation Française. Nous avons à prendre sur nous de toutes les manières, pour devenir ce que nous devons être et ce que nous serons. Je veux dire un grand peuple non seulement libre mais un des plus grands, parmi les plus grands et les plus célèbres. Que tous les français et les françaises le sachent et le sentent. C’est d’eux que dépend leur grandeur, notre grandeur. Et cet effort là ils veulent le fournir parce que leur grandeur n’est-ce-pas, ils la veulent. » La foule applaudit une troisième fois.

« Voilà les sentiments qui nous animent tous. La façon dont vous accueillez les paroles que je vous adresse au nom du gouvernement de la République, la façon dont vous accueillez ces paroles, prouve à quel point l’union de tous ceux qui savent où ils veulent aller dans ce pays martyrisé mais qui veut être grand est prête à se faire, sous les conditions qui sont indispensables à tout ce qui est grand. Je veux dire : la liberté, l’union et l’ardeur. » Applaudissements à nouveau, puis Charles de Gaulle conclut : « Je demande à Evreux d’exprimer en chantant avec moi notre hymne national « La marseillaise » les sentiments qui l’animent et qui j’en réponds, sont ceux de toute la France. »

Il participe ensuite à un déjeuner, organisé en son honneur par le secrétaire de mairie, Lucien Vochel, qui rassemble une cinquantaine de personnes. Voyant quelques officiers américains attablés, invités par la municipalité, de Gaulle souffle : « Ils sont encore là, ceux-là ! » 
[source : VOCHEL Lucien. Un parcours inattendu. Paris : éditions Hervé Chopin, 2013]

Mais la journée du grand homme est chronométrée. Après avoir signé le Livre d’or de la Mairie, saluant le courage d’Evreux : « Bonne ville de France, blessée au service du pays », à nouveau acclamé par les ébroïciens, Charles de Gaulle prend ensuite la route du Neubourg et de Louviers.

Une semaine plus tard, le Commissaire Régional de la République de Rouen, Henri Bourdeau de Fontenay, écrit à Georges Bernard : « Au Neubourg, à Évreux comme à Louviers, l’enthousiasme des populations nous a profondément émus. (…) Je suis personnellement très heureux de pouvoir vous confirmer que le Général de Gaulle a été très favorablement impressionné par les inoubliables acclamations qu’il a reçues au cours de son voyage. »

Le 9 juillet 1960

Comme en 1944, c’est à l’occasion d’une tournée en Normandie que le Général de Gaulle, premier Président de la toute jeune Vème République, fit halte à Évreux, lors d’un marathon qui devait l’emmener dans la même journée de Caen à Lisieux, Bernay, Évreux, Gaillon, Les Andelys puis Rouen !

La visite fut préparée minutieusement, et le Conseil municipal, sous la direction du Maire Armand Mandle, rédigea un dossier documentaire de huit pages pour présenter Évreux : sa démographie (38 000 habitants) ; son histoire ; ses principales activités et ressources, ses grands hommes passés et présents. Un long texte rappelle les circonstances de la libération de la ville le 23 août 1944, ainsi que le précédent passage de celui qui n’était encore que chef d’un gouvernement provisoire.

Plus original, le dossier documentaire se clôturait par une page de doléances de la population ébroïcienne, libellée comme suit : « la population ébroïcienne suit avec intérêt les efforts du Président de la république pour assurer le maintien de la légalité républicaine et promouvoir en Algérie une politique d’autodétermination approuvée par la quasi-unanimité de la Nation. » Suivaient une liste d’aspirations : « à une évolution plus démocratique du régime ; à un plus grand respect de la liberté individuelle et de la liberté de la presse », à la « sauvegarde de l’école laïque », à « un retour de la paix en Algérie et son maintien dans le monde entier ».

Quant au Conseil municipal d’Évreux, il présentait ses propres doléances : il « proteste contre les abus du contrôle financier des communes (…) il demande le rétablissement des libertés locales, une décentralisation allant vers l’autonomie communale ; des réformes administratives. »

Le général de Gaulle montant l’escalier de l’hôtel de ville, entouré du maire Armand Mandle et de son premier adjoint, Augustin Azémia, 1960

Armand Mandle ne tarit pas d’éloges en présentant sa ville au Général : « Après 15 années d’efforts, 1500 immeubles détruits et 2800 gravement endommagés ont été reconstruits (…) Notre ville vous offre le spectacle d’un ensemble moderne qui a su concilier le caractère traditionnel de notre architecture régionale avec les exigences de l’urbanisme. (…) Cet ensemble a placé notre cité à l’extrême avant-garde des villes françaises dans le domaine de la construction. »

En réponse à l’allocution du maire d’Evreux, Charles de Gaulle prononce ces paroles : « J’ai écouté avec émotion votre discours. Je me rappelle ma visite à Evreux, démolie pour les trois quarts. Je rends hommage à votre ville, devenue une grande ville. Vous êtes résolus à envisager l’avenir d’une manière dynamique. Vos constructions, vos réalisations industrielles, vos ensembles scolaires sont des modèles du genre. Vous avez réalisé l’unanimité de ses habitants pour aller de l’avant. Une deuxième fois je repartirai d’Evreux avec un souvenir inoubliable. Merci Evreux, merci de cette magnifique assemblée qui est pour moi un témoignage , qui est pour la France une preuve de ce qu’elle vaut, et qui est d’ailleurs pour le monde entier une sorte de démonstration de l’unité française. Encore une fois, merci Evreux »

Malgré leurs doléances, les Ebroïciens avaient été nombreux au rendez-vous : la place de Gaulle était noire de monde, comme en 1944. D’ailleurs, lorsque l’on compare les photographies de ces deux voyages, il est difficile de les distinguer à moins d’observer que dans un cas, la foule tourne le dos à des ruines et dans l’autre… au Café des Travailleurs !

Afin que Charles de Gaulle conserve un souvenir de son passage à Evreux, la municipalité lui offre un exemplaire de « L’Histoire civile et ecclésiastique du comté d’Evreux » de Pierre Le Brasseur, imprimé en 1722.

Quoi qu’il en soit, le Général de Gaulle sembla ravi de son passage à Évreux et manifesta sa satisfaction auprès du préfet Boissier, lequel retransmit à M. Mandle un mois plus tard.

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